6 octobre 2014

Les uniformes de fantaisie pour les enfants


▲Portrait d'enfant en costume « à la hongroise », Pierre Subleyras, vers 1740-1749, sur Wikimedia Commons

Les images représentant des enfants au XVIIIe siècle (dessins, peintures) montrent de façon récurrente un costume de garçonnet, dit « à la hongroise », curieuse tenue qui ne manque pas d'interroger l'histoire de la mode enfantine. Entre uniforme, panoplie et travestissement, il est constitué d'un dolman à brandebourgs et d'un bonnet à pompon retombant sur le côté, type bonnet de police. Cette tradition du port d'un uniforme de fantaisie se perpétue dans la première moitié du XIXe siècle. La panoplie de soldat reste un déguisement de garçonnet apprécié jusqu'à la Première Guerre mondiale. Que nous révèlent de l'histoire de l'enfance ces petits militaires de fantaisie ? Quelle influence ont-ils eue sur la mode enfantine ?

▲Les bosquets du Théâtre d'Eau dans les jardins de Versailles au début du XVIIIe siècle (détail)
La scène montre en son centre un jeune page portant la traîne d'une dame ;
il semble porter un costume « à la hongroise ».
École française, Château de Versailles et de Trianon sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Le jeune comte de Lau, portant les armes devant le logis de son père,
faisant ses premières armes dans son régiment, Louis Carrogis, dit Carmontelle, vers 1777-1780
Musée Condé, Chantilly sur Agence photo RMN Grand Palais
à dr. : Uniforme de Timothée Bécays-Lacaussade, officier du régiment de Neustrie, réglementation de 1786
Timothée commence sa formation militaire à l'âge de 10 ans, en 1770, dans le régiment de Neustrie ;
quand il démissionne en 1792, il est capitaine dans ce même régiment.
Cet uniforme est parmi les plus anciens conservés par le Musée de l'Armée, Paris.

▲Louis XV chassant le cerf dans la forêt de Saint-Germain (détail), Jean-Baptiste Oudry, 1730
Musée des Augustins, Toulouse
Cerf aux abois dans les rochers de Franchard, forêt de Fontainebleau (détail), Jean-Baptiste Oudry, 1738
Musée du château de Fontainebleau
Les participants à la chasse royale portent l'habit en drap bleu orné de galons or et argent
et la culotte écarlate imposés par l'étiquette pour la chasse au cerf
– sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Vue du château de Choisy le Roy du côté du jardin, 1750
à dr. : Habit de drap galonné à la financière avec un galon large
dessin Le Clerc, graveur Dupin, Galerie des Modes, 20e cahier, 1778
La légende précise : «  C'est ce qu'on appelle un Habit à la Choisi ; ainsi nommé parce qu'il est d'étiquette
lorsque la Cour se rend au château de Choisi. Cette même étiquette veut qu'il soit de couleur verte.
Il doit être d'une autre couleur, lorsque la Cour va à Marli, à St. Hubert, à la Muette. »
La garde-robe royale de Louis XV lui fait livrer 4 habits, 5 vestes (gilets) et 2 culottes
pour la résidence de Choisy, pendant l'année 1772.
– sur Gallica, BnF, Paris

▲Les Gentishommes du duc d'Orléans dans l'habit de Saint-Cloud,
Félix Philippoteaux d'après une gouache de Louis Carrogis, dit Carmontelle
L'image figure six gentishommes vêtus de la redingote rouge et bas noir
de l'habit de campagne de la maison d'Orléans
Les Arts décoratifs, Musée Nissim de Camondo, Paris

Le costume de fantaisie « à la hongroise » des enfants du XVIIIe siècle

Dans la société d'Ancien Régime, la tradition veut que le garçonnet de la noblesse débute son éducation intellectuelle lorsqu'il quitte la robe, vers quatre à six ans. Parallèlement, il apprend à monter à cheval et à manier l'épée avec un maître d'armes. Vers douze ans, quinze pour Versailles, il peut devenir page ou enfant d'honneur. Être reçu comme page dans la maisonnée d'un roi ou d'un prince est une faveur recherchée. Elle permet à l'enfant d'apprendre les règles de la cour, d'établir des contacts précieux pour son avenir. Il peut par exemple intégrer un régiment comme cadet.

Toute la légitimité de la noblesse d'Ancien Régime est basée sur cette tradition guerrière au service du roi, elle est même à l'origine de la mode aristocratique du «corps redressé» en vigueur pendant plusieurs siècles – l'expression est de Georges Vigarello [Lire sur Les Petites Mains, Sous l'Égide de Mars, costume militaire - costume civil]. Pour entrer comme page dans la grande et la petite écurie de Versailles, la famille doit prouver une noblesse militaire ou « d'épée » – par opposition à la noblesse dite « de robe » – antérieure à 1550. Le jeune garçon est le plus souvent présenté à la Cour lors d'une chasse. La couleur de l'habit exigé change selon le gibier chassé, habit en drap bleu orné de galons or et argent et culotte écarlate pour le cerf, drap vert galonné d'or pour le daim... – Louis XIV y a vu un moyen supplémentaire d'imposer un nouveau critère de distinction, la permission de le porter est très recherchée par les courtisans. Selon ses quartiers de noblesse, le jeune garçon peut être admis à résider dans les résidences princières ou royales. Il porte alors, comme les adultes, l'habit spécial dédié à la résidence. Par exemple, l'habit de résidence pour les séjours à Choisy, très prisés par Louis XV, imposent l'uniforme bleu-vert galonné d'or ; celui de Trianon est rouge brodé d'or...

Au service de son prince, le jeune page porte la livrée. Si au XVIIe siècle, les livrées d'honneur, qui distinguent les personnes de corps, et les livrées de servitude, qui concernent les domestiques, sont comparables (couleur des tissus, broderies et passements, boutons...seule la largeur des galons distingue grande, moyenne et petite livrée), au XVIIIe siècle, la livrée tend à montrer un état subalterne. Elle reste cependant un objet de prestige. Les obligations qui découlent du port de la livrée ou de l'uniforme d'une grande famille sont particulièrement valorisées. Manquer de respect pour pour le porteur de la livrée royale équivaut à une atteinte à la personne du roi, qui lui-même porte un uniforme parce qu'il est au service de l'État. L'uniforme symbolise « l'honneur et la fierté de servir ».

▲à g. : Monsieur Melin, riche notaire de Paris et le jeune des Gravières, son petit-fils, 1759
à dr. : Madame de la Haye, fermière générale et son fils, 1760
Les deux garçonnets portent un uniforme de fantaisie « à la hongroise »
Louis Carrogis, dit Carmontelle, Musée Condé, Chantilly sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Portrait de femme avec enfant (détail), Louis Carrogis, dit Carmontelle, XVIIIe siècle
collection privée, vente 2012 étude J.J. Mathias - Baron Ribeyre & Associés - E. Ferrando
à dr. : Les deux petits frères (détail), fils du fermier général de Neuville,
Louis Carrogis, dit Carmontelle, 1767, collection privée, vente 1992 Christie's

▲Bonnet de police d'officier supérieur en drap de laine brodé, régiment des hussards de Bercheny, vers 1776-1786
Le premier régiment de hussards est levé en 1721 en Turquie par Ladislas Bercheny,
noble hongrois passé au service de la France de la Régence,
après l’échec de l’insurrection du prince Rakoczy contre l’Autriche.
Musée de l'Armée, Paris

▲à g . : Marie-Josèphe de Saxe et son fils Louis, duc de Bourgogne (détail), Maurice Quentin de La Tour, 1761
(Le duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XV, fils aîné du dauphin Louis-Ferdinand, meurt à 10 ans en 1761)
Musée Antoine Lécuyer, Saint-Quentin sur WikiArt
à dr. : La famille Devin, Louis-Michel Van Loo, 1767, collection particulière sur Wikimedia Commons

▲à g . : Charles-Philippe, comte d'Artois (futur Charles X) et sa sœur Marie-Clothilde
François Hubert Drouais, 1763
(Petits-enfants de Louis XV, ils sont les enfants du dauphin Louis-Ferdinand et de Marie-Josèphe de Saxe)
à dr. : Habit et culotte à la hongroise pour petit garçon, en soie cannelée bleue, vers 1760
Palais Galliéra, Musée de la mode de la Ville de Paris
photographie de presse Agence Rol, 1920, sur Gallica

▲à g. : La famille Sagredo (détail), Pietro Longhi, 1768, Pinacothèque Querini Stampalia, Venise
En plus de son uniforme de fantaisie, le petit garçon porte un sabre.
à dr. : Portrait de famille (détail), Pietro Longhi, vers 1752, Ca'Rezzonico, musée du XVIIIe siècle, Venise
– sur WikiArt

Dans un tel contexte, on imagine que les garçonnets de la noblesse, pressés de grandir, apprécient de porter un uniforme ; sa fantaisie rappelle qu'ils ne sont encore que des enfants. Ce costume est porté dans le cadre du cercle familial ou à la Cour. Le style s'inspire des uniformes des régiments étrangers, jugés plus exotiques, plus chatoyants. En 1763, à la fin de la guerre de Sept Ans, la renommée du corps d'élite impérial des hussards de Marie-Thérèse d'Autriche diffuse dans toutes les cours d'Europe le costume dit « à la hongroise », constitué d'un dolman à brandebourgs et d'un bonnet à pompon, type bonnet de police, retombant sur le côté. Les représentations de garçons portant ce costume sont très nombreuses, la plus célèbre est celle du fils du dauphin Louis-Ferdinand et Marie-Josèphe de Saxe, futur Charles X, avec sa sœur Clothilde, par François-Hubert Drouais.

▲à g. : Garçonnet en uniforme de fantaisie inspiré de celui des hussards, vers 1814
Pierre de La Mésangère, Journal des Dames et des Modes,
Bibliothèque municipale, Rouen
à dr. : Ensemble trois pièces à la hussard en toile de coton et habit dégagé, vers 1810
photographie Karin Maucotel, catalogue de l'exposition La Mode et l'enfant 1780... 2000, Musée Galliéra, 2001
Palais Galliéra, musée de la mode de la Ville de Paris

▲à g. : Costume en laine et soie porté par le « roi de Rome », fils de Napoléon Ier, vers 1814-1815
(Les mensurations du vêtement indiquent une taille 3-4 ans)
à dr. : Garçonnet en costume de toile et spencer à double boutonnage, vers 1814
Pierre de La Mésangère, Journal des Dames et des Modes,
Bibliothèque municipale, Rouen

▲à g. : Joachim Murat en uniforme de hussard, baron François Pascal Simon Gérard, 1801
Château de Versailles et de Trianon sur Agence photo RMN Grand Palais
à dr. : Portrait d'un garçonnet en costume de hussard, attribué à Léon Cogniet, vers 1818
collection particulière, exposition Des Hommes et des Jouets, 2011-2012, Grand Palais sur Tout pour les femmes.com

▲à g. : Garçonnet en uniforme de fantaisie et chapeau inspiré du shako des hussards, vers 1814
Pierre de La Mésangère, Journal des Dames et des Modes, Bibliothèque municipale, Rouen
à dr. : Portrait de José Costa y Bonnells dit Pépito, Francisco de Goya, vers 1810-1814
Par son chapeau et ses broderies dorées, le costume de Pépito s'inspire des casaques militaires
des soldats de la guerre d'indépendance d'Espagne ;
l'analogie militaire est renforcée par la présence du tambour et des jouets guerriers.
The Metropolitan Museum of Art, New York

▲à g. : Costume marin du prince Albert Edouard, 1846, National Maritime Museum, Greenwich
à dr. : Portrait d'Albert Edouard, prince de Galles, par François Xavier Winterhalter, 1846, Royal Collection Trust
Albert Édouard est ici représenté vers quatre ou cinq ans en costume de simple matelot,
inspiré des uniformes de la Royal Navy,
blouse et pantalon à pont blancs, marinière à grand col bleu et chapeau en toile cirée à ruban noué ;
il lance la mode du costume marin, qui gagne toute l'Europe et dure plus d'un siècle.

Les uniformes de fantaisie des enfants au XIXe siècle

Le XIXe siècle poursuit la tradition d'Ancien Régime d'habiller les garçonnets dans des uniformes de fantaisie. Cette mode ne concerne plus seulement les garçonnets des familles princières ou régnantes, elle s'adapte aux enfants des classes aisées. Sous l'Empire et la glorification des conquêtes napoléoniennes, le goût marqué de l'uniforme influence la mode enfantine au quotidien. La chute de l'Empire et la présence de nombreux militaires étrangers à Paris après 1814 laissent des traces sur la mode, en particulier les chapeaux. On copie les casques militaires et leurs plumets ; une bride jugulaire passe sous le menton. À partir de 1804 et jusque dans les années 1820, on adapte pour les garçonnets les uniformes militaires d'apparat des soldats. L'été, on les habille de costumes de hussards en toile légère.

Les Petites Mains ont plusieurs fois raconté comment la reine Victoria, en hommage à la marine nationale britannique, a mis à la mode, dans les années 1845-1850, le costume marin qui habille d'abord son fils, le prince Albert Édouard, puis tous les petits garçons occidentaux jusque dans les années 1930, parfois même au-delà. [Lire sur Les Petites Mains : La salopette marine du prince George et Histoire du costume marin]

▲à g. : L'impératrice et ses hôtes en tenue de vénerie à Compiègne, 30 octobre 1856
photographie comte Olympe Aguado
à dr. : Le prince impérial en tenue de vénérie au pied du « Caïn maudit » de Jouffroy
photographie Charles Hideux, 1863
– Château de Compiègne sur Arago, le portail de la photographie

▲à g. : Le prince impérial en tenue de vénerie, photographie Charles Hideux, vers 1863
à dr. : Costume de vénérie du prince impérial, Paule (tailleur), 1861
C'est un costume Louis XV de vénerie, tunique et gilet en drap vert doublé de drap rouge,
parements de velours rouge, culotte de peau, bottes, ceinturon et couteau de chasse et fouet (manque le tricorne).
– Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Portrait du prince impérial en costume de grenadier et bonnet de police,
photographie André Adolphe Eugène Disdéri, vers 1859
à dr. : Veste et pantalon de petite tenue et bonnet de police
de caporal du premier régiment des grenadiers de la Garde impériale,
porté par le prince impérial, vers 1859-1860
(Le prince porte encore la robe des petits enfants)
– Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲Uniforme de zouave du prince impérial, vers 1861
Dolman en drap rouge à brandebourgs de soie noire et passepoil bleu, culotte bouffante en drap bleu,
burnous en drap rouge avec galons de soie noirs et fils d'or
Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Le prince impérial revêtu de l'uniforme de caporal du premier régiment des grenadiers de la Garde,
photographie Léon Crémière, 1865-1866, Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais
à dr. : Uniforme de caporal du premier régiment des grenadiers de la Garde, porté par le prince impérial
Musée de l'Empéri, Salon de Provence sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Costume andalou du prince impérial en velours de soie, vers 1859
photographie Karin Maucotel, catalogue de l'exposition La Mode et l'enfant 1780... 2000, Musée Galliéra, 2001
Musée du Costume, Château-Chinon
à dr. : Veste en peau du costume mexicain du prince impérial, Godard tailleur Mexico, vers 1862
Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

En France, les cours royales ou impériales du XIXe siècle perpétuent la tradition d'Ancien Régime d'honorer des personnes invitées à suivre la chasse. Sous le Second Empire, les invités à Compiègne auxquels on a accordé « le bouton » reçoivent une lettre accompagnée d'une boîte contenant les boutons destinés à garnir leur habit de chasse, plus un pour le chapeau. Ces couleurs et boutons sont distinctifs du rallye, nom que prennent les équipages depuis que Louis-Philippe, non chasseur, a supprimé la Vénerie royale et mis en location les forêts de la couronne en 1830 – de cette tradition est issu l'emploi actuel du mot rallye dans la « haute société », pour désigner les rencontres de jeunes gens dans les propriétés familiales. Dès 1852, Napoléon III réorganise la vénerie sur le modèle de la vénerie royale. L'uniforme est un habit de drap vert en velours galonné d'argent et d'or et culotte blanche. Le château de Compiègne conserve un costume de vénerie et plusieurs photographies du prince impérial Louis Napoléon dans cette tenue.

Outre ses tenues de vénerie, le prince impérial possède toute une série d'uniformes de fantaisie : comme le prince Albert d'Angleterre, un costume marin aux couleurs du yacht impérial Reine Hortense, remplacé par L'Aigle en 1859 ; un uniforme de spahi, d'officier d'armée d'Afrique... À trois ans, alors qu'il porte encore la robe, il est représenté en costume de grenadier de la garde impériale, le préféré de son grand-oncle, Napoléon Ier. Le musée de Compiègne conserve aussi un superbe costume en peau en souvenir de l'expédition du Mexique, un costume andalou et un costume écossais d'apparat.

▲à g. : Albert Édouard, prince de Galles et le prince Alfred, fils de la reine Victoria,
François-Xavier Winterhalter, 1849, Royal Collection Trust
à dr. : Panoplie écossaise du prince impérial, vers 1859
Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Tablier de la panoplie écossaise du prince impérial, vers 1859
Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais
à dr. : Le prince Alfred et la princesse Helena, enfants de la reine Victoria,
François-Xavier Winterhalter, 1849, Royal Collection Trust

▲à g. : La princesse Louise, le prince Arthur et le prince Léopold, enfants de la reine Victoria
François-Xavier Winterhalter, 1856, Royal Collection Trust
à dr. : Veste de la panoplie écossaise du prince impérial, vers 1859
Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲Costume écossais, Angleterre, vers 1860
The Metropolitan Museum of Art, New York

▲Le prince George (futur George V), fils de Édouard VII, petit-fils de la reine Victoria,
en 1869 et en 1873, Royal Collection Trust

▲à g. : Costume écossais, Angleterre, vers 1900
Los Angeles County Museum of Art, Los Angeles
à dr. : Le prince Édouard (futur Édouard VIII) et le prince Henry, fils de George V à Balmoral, 1910
Royal Collection Trust

Le costume écossais des garçonnets et le kilt

Le costume écossais fait son entrée dans la mode enfantine selon le même processus que le costume marin, grâce aux enfants de la reine Victoria. Suite à l'échec des révoltes jacobites à la bataille de Culloden en 1746, qui marque la fin des espoirs de rétablir les Stuart sur le trône d'Écosse, le port du kilt et tout ce qui rappelle le mode de vie traditionnel des Highlanders, clan, tartan et même la cornemuse, sont interdits dans le royaume. Ils ne devront leur survie qu'à l'uniforme et aux traditions militaires des régiments des Highlands qui servent dans l'armée britannique. On doit le retour civil du costume écossais à Walter Scott et au formidable succès international du roman Ivanhoé, paru en 1819, qui donne une image romantique de l'Écosse. Considéré comme comme un prince de la mode lorsqu'il vient à Londres dans les années 1820, reçu à la cour de George IV, il remet le kilt au goût du jour. Cette mode trouve sa place dans la vogue historiciste qui caractérise le début du XIXe siècle.

En 1848, la reine Victoria et le prince Albert louent pour la première fois le château de Balmoral en Écosse, dont ils vont ensuite acquérir la propriété. Des travaux d'agrandissement et d'embellissement ont lieu entre 1853 et 1856. Balmoral devient la résidence d'été des souverains britanniques. Lors des bals et réceptions à Balmoral, la famille royale porte le kilt et le tartan. Comme pour le costume marin, les photographies et représentations charmantes des enfants et petits-enfants de la reine Victoria en costume écossais, contribuent à diffuser cette mode dans toute l'Europe.

▲à g. : Le prince impérial Louis-Napoléon à Fontainebleau, photographie Pierre-Louis Pierson, août 1860
Le prince a quatre ans, il porte un ensemble jupe et boléro.
à dr. : Panoplie écossaise du prince impérial, kilt et bas, vers 1859
Le kilt, vêtement masculin, est apprécié pour les garçonnets qui portent encore la robe.
– Château de Compiègne sur Agence photo RMN Grand Palais

▲à g. : Costume écossais pour garçon, vers 1880
label « Best & Company Liliputian Bazaar, 315 Sixth Avenue New York », The Charleston Museum
au centre : Costume écossais pour petit garçon de 3 à 5 ans, La Mode illustrée, 2 novembre 1890
à dr. : Costume écossais pour petit garçon de 3 à 5 ans, La Mode illustrée, 29 décembre 1901

▲Costume écossais, vers 1909, The Metropolitan Museum of Art, New York▼


Dans les années 1850-1870, les petits garçons portent la robe jusqu'à l'âge de quatre à six ans [Lire sur Les Petites Mains, Mode enfantine et luxe, Le petit enfant en robe et La Vêture des Enfants trouvés, Les enfants en robe]. L'élégance d'origine anglaise, indiscutée, du kilt, vêtement masculin, en fait un succès durable du vestiaire enfantin, il s'étendra la mode des fillettes.

À mi-chemin entre « vrais » vêtements et uniformes pour « faire semblant » – le terme anglais pretend uniforms est explicite – ces costumes et uniformes de fantaisie entretiennent le goût naturel des enfants à se travestir. Certains d'entre eux influencent durablement la mode enfantine au quotidien. Pendant la Première Guerre mondiale, l'uniforme exprimera le patriotisme exacerbé qui touche aussi les jeunes enfants. Jeux de rôles, scénettes et « tableaux vivants » glorieux ou pathétiques sont mis en scène par le biais des costumes. En France, les garçonnets reçoivent des panoplies de « poilus », de tirailleurs... les fillettes des tenues d'infirmières [Lire sur Les Petites Mains : La rentrée scolaire 1914].

▲à g. : Garçonnet revêtu d'une panoplie de cuirassier, début XXe siècle sur Delcampe
à dr. : Panoplie de cuirassier, vers 1910
Salle Calvin, Couvent des Augustins, Musées de Bourges sur webmuseo.com

▲à g. : Uniforme d'infanterie pour enfant et photographie de l'enfant qui l'a porté, début de la Guerre 14-18
photographie Yazid Medmoun, Historial de la Grande Guerre, Péronne
à dr. : Panoplie de tirailleur algérien de l'armée d'Afrique pour enfant, vers 1900
Le gilet porte une étiquette Galeries Lafayette.
photographie Yannick Marques Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux, Meaux

▲à g. : Panoplie bleu horizon de soldat d'infanterie pour enfant, 1914-1918
Historial de la Grande Guerre, Péronne, publié par Mounette_Girl sur Pages 14-18 Forum
au centre : Garçonnet portant un casque Adrian (à sa taille), un fusil et une médaille,
publié par Guy François sur Pages 14-18 Forum
à dr. : Vareuse et pantalon bleu horizon de lieutenant du 2e Régiment d'infanterie pour enfant, vers 1925-1930
confectionné par La Samaritaine, Musée de l'Armée, Paris
[On peut lire la notice complète et circonstanciée sur le site du musée]

▲Pendant la Première Guerre mondiale, les enfants d'une famille rapatriés à la campagne
se distraient en montrant de « pathétiques » tableaux vivants :
infirmières, soldat à shako, officier, et même une petite cantinière entourent le héros blessé.
sur le site de la famille Berne


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